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“Crasse” : L’universalité du deuil

Nommé à la cérémonie des BAFTA 2025 (les Césars made-in England) dans la catégorie Meilleur Premier Film Britannique Crasse est réalisé par Luna Carmoon et met en scène la révélation Saura Lightfoot-Leon et Joseph Quinn (Stranger Things, Gladiator II). Le film débarque sur nos écrans français ce 11 juin.

Synopsis : Londres, 1984. Maria, âgée de 7 ans, et sa mère vivent dans un monde bien à elles, tendre et singulier, tissé d’amour et de trésors amassés. Mais une nuit, tout bascule. Dix ans plus tard, Maria vit une vie paisible dans sa famille d’accueil quand un jeune homme plus âgé, Michael, fait irruption dans leur foyer, ravivant des blessures enfouies et brouillant la frontière entre magie et folie…

Copyright Piece of Magic Entertainment

Crasse est un film singulier, lorgnant vers le fantastique, qui s’exprime visuellement et avec exubérance. Nous suivons la vie et les traumatismes de la jeune Maria (Lightfoot-Leon) perdue entre son enfance et son adolescence. Auprès d’une mère aimante mais irresponsable, atteinte du Syndrome de Diogène qui pousse à conserver et accumuler des biens de manière compulsive, Maria s’épanouit et vit la vie rêvée sans loi, sans limite. Jusqu’au jour où elle découvre que sa vie n’est peut-être pas aussi normale qu’elle en a l’air. Puis le drame survient et nous faisons un bond dans le temps. Maintenant adolescente, Maria rencontre Michael (Quinn) et une relation des plus étranges s’installe entre eux. La cinéaste Luna Carmoon insuffle à son premier long-métrage une énergie débordante qui ne demande qu’à exploser, un peu à l’image de la mère de Maria, si attachante dans son envie de créer des souvenirs avec sa fille.

La première partie du film, bien ancrée dans le réel d’une famille monoparentale, nous expose ce lien fort avant de le briser dans sa deuxième. Celle-ci est empreinte de fantastique et de mysticisme où la jeune fille fait tout pour revivre son passé. Elle se sert notamment de sa nouvelle relation ambiguë avec Michael pour explorer, oser et braver les interdits. C’est terrassant de voir comment le deuil et les traumatismes de l’enfance marquent à ce point nos vies. Ce passage à l’âge adulte est difficile pour Maria qui a besoin de ressentir les émotions du passé en entassant les ordures comme sa mère ou en s’auto-infligeant des douleurs physiques. Luna Carmoon nous fait vivre une expérience viscérale et sensorielle au plus proche des corps et de la crasse. À plusieurs reprises, le spectateur est coincé entre dégoût et compassion pour ces personnages paumés qui cherchent un sens dans l’accumulation et la surabondance des choses de la vie. Il y a un véritable message universel sur la manière dont on gère la disparition et le deuil.

Crasse semble être au premier abord un film sans une once de joie, presque nihiliste, mais l’espoir subsiste en fin de récit pour Maria et pour le spectateur aussi. Tout n’est pas perdu et les beaux souvenirs persistent dans le temps, il faut juste le laisser exercer sa magie. Au cinéma ce 11 juin.

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